Chardons Infos N°63 - Automne 2008 |
(Ré) Flexion sur le
genou
Le
ligament croisé antérieur
Nombreux sont les footballeurs qui se
sont "pétés les croisés" en pratiquant leur sport favori. Un
éminent professeur, qui a opéré plusieurs de nos
sociétaires, nous dit tout sur le ligament croisé antérieur.
Anatomie : Le ligament
croisé antérieur (LCA) est le ligament du genou le plus
important pour la pratique sportive. Il empêche la
translation antérieure du tibia par rapport au fémur. Il a
une morphologie cylindrique avec un diamètre moyen de 7 cm.
Mécanismes de rupture : Il faut
distinguer les traumatismes avec un contact, avec appui sur
le genou, et les traumatismes sans contact. Les traumatismes
avec contact sont dus à un choc avec un adversaire qui vient
s'appuyer fortement sur la partie externe (le plus
fréquemment). Les traumatismes
sans contact correspondent le plus souvent à un pivot mal
contrôlé lors d'une phase d'appui, le pied restant planté
dans la pelouse alors que le haut du corps continue à
tourner. Il peut s'agir également d'un shoot dans le vide.
Symptômes, évolution : Lors de la
rupture, le patient perçoit souvent un "crac" accompagné
d'une douleur violente mais brève. S'il essaie de se relever
et de prendre appui, il sent sa jambe "folle" sans
possibilité de contrôle. Les suites
immédiates sont souvent moins difficiles, la douleur se
réveillant progressivement au fur et à mesure que le genou
gonfle du fait du saignement dans l'articulation. Plus le
temps passe, plus la gêne est importante, avec une mise en
flexion du genou dans un but antalgique et une contraction
musculaire. Une fois la phase
aigue passée, les symptômes vont dépendre de l'évolution du
LCA lui-même. Il peut exister
une pseudo-cicatrisation qui ramène le genou à un état
presque normal quant à la laxité. Dans ces
conditions, la gêne sera modérée, il n'y aura pas
d'instabilité. L'évolution peut
se faire (le plus fréquemment) vers un défaut de
cicatrisation. Le genou est alors laxe, il a du "jeu", ce
qui le rend immédiatement inapte à la pratique sportive. Le
risque est alors d'avoir des dérobements perçus par le
patient comme des "déboîtements" qui peuvent causer des
lésions méniscales et cartilagineuses, aggravant ainsi les
symptômes.
Diagnostic : Le diagnostic de
rupture du LCA est avant tout fait grâce à l'examen
clinique, qui est plus facile immédiatement après
l'accident, ou plus tard lorsque les phénomènes douloureux
se sont estompés. Il faudra
également tester les ligaments périphériques. L'IRM
(imagerie par résonance magnétique) est l'examen ultime qui
confirmera la rupture du LCA et permettra de savoir s'il
existe des lésions associées qui peuvent être ligamentaires
périphériques, méniscales ou cartilagineuses.
Conduite à tenir : Elle dépend de
différents facteurs, tels que l'âge, l'activité physique et
les délais entre l'accident et le moment où le patient est
vu. Toutes les
ruptures du LCA ne sont pas à opérer, et beaucoup de
patients vivent normalement sans LCA. Pour faciliter
les explications, prenons 2 cas extrêmes : d'une part, un
footballeur de 20 ans qui joue régulièrement dans un club,
et d'autre part, une personne de 45 ans qui a une activité
sportive de loisir. Dans le 1e cas,
une intervention chirurgicale est souhaitable puisqu'il est
difficile de reprendre le football sans avoir un risque de
dérobement itératif avec possibilité de dégradation
cartilagineuse ou méniscale. L'opération doit être différée
dans l'attente de la récupération d'un genou normal qui
n'est plus douloureux et qui a récupéré ses amplitudes
articulaires. 45 jours sont habituellement nécessaires pour
atteindre cet objectif. Dans le 2e cas,
il est préférable de ne pas opérer immédiatement. La prise
en charge débute par un traitement dit conservateur qui
associe parfois une immobilisation et de la rééducation, une
reprise des activités sportives dans l'axe à partir du 45e
jour post-accident. Le genou est
alors testé pour savoir s'il existe une pseudo-cicatrisation
avec diminution de la laxité, et s'il en est ainsi, à partir
du 60e jour, pourront débuter les pivots, ce qui permet de
tester le genou. Si tout va bien, le patient reprendra
progressivement tous les sports qu'il désire pratiquer. Si,
à un moment donné, il présente une instabilité, il importera
de rediscuter du problème pour aller éventuellement jusqu'à
la chirurgie. Chaque malade
étant un cas particulier, toutes les variations sont
envisageables entre ces 2 extrêmes.
Intervention et rééducation : L'intervention
consiste en la réfection du LCA. Pour cela, différentes
greffes sont utilisables : le tendon rotulien, les muscles
de la patte d'oie ou le tendon quadricipital. Elle se fait sous
contrôle arthroscopique pour réaliser les tunnels fémoraux
et tibiaux à travers lesquels sera glissée la greffe. La
rééducation est un moment fondamental pour récupérer les
amplitudes articulaires, retrouver une bonne qualité
musculaire et une marche normale. Le travail de la
préparation physique ne peut commencer qu'à partir du 5e
mois en respectant certaines précautions, l'entraînement
sportif ne débutant progressivement qu'à partir du 7e mois.
Le risque de nouvelle rupture existe, il est évalué entre 3
et 10%, mais le risque le plus important se situe sur le
genou controlatéral qui est statistiquement plus souvent
lésé chez des malades qui ont déjà eu une rupture du LCA par
comparaison à ceux qui n'en ont jamais eu.
Prévention : Il n'existe
aucune possibilité d'éliminer tout risque de rupture du LCA
au cours de la pratique sportive, mais certaines études ont
montré qu'il était possible de diminuer le risque en
réalisant de façon continue des exercices basés sur la
proprioception, le contrôle des positions des articulations
du membre inférieur, les muscles susceptibles de protéger le
LCA.
Conclusion : Le développement
généralisé de l'activité sportive a généré de plus en plus
de ruptures du LCA. Le traitement
chirurgical a atteint sa maturité mais le plus important
serait d'essayer de diminuer l'incidence grâce à un travail
spécifique préventif. Certaines fédérations ont déjà
commencé ce travail. Il devrait être repris par toutes de
façon à diminuer le nombre de ruptures qui ont un coût
social non négligeable. |
© Étoile Sportive Cernex 2008
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